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La SNCF ou la chronique d'un alcoolisme annoncé
12 juin 2013

Carglass répare, Carglass remplace... à prix d'or!

Il y a quand même des jours où je m’interroge sur la nature humaine, et particulièrement sur une partie de l’espèce humaine qui bosse à la SNCF. Ma grande question est : sont-ils drogués ou secrètent-ils naturellement des substances ? Et là, j’ai une pensée toute particulière pour un(e) juriste qui s’est dit qu’il était judicieux de poursuivre dans la voie d’un contentieux, et d’alimenter un avocat en ce sens.

L’histoire, la voici, directement tirée du journal Sud-Ouest :

Enfermé dans un train, un jeune Oloronais casse une vitre... la SNCF lui a réclamé 14000 euros

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Le garçon de 20 ans ne se réveille pas à l'arrivée en gare d'Oloron. Enfermé dans le train, il finit par casser une vitre et se retrouve poursuivi en justice. L'affaire dure un an.

                       

Le garçon s'est réveille en gare d'Oloron, seul et dans le noir (DR)

C’est une affaire ubuesque dans laquelle s’est retrouvé embarqué un Oloronais de 20 ans, avant d’être enfin entendu par la justice. Le 4 avril 2012, Julien rentre chez lui, après une journée de travail. Le garçon est en stage à Tarbes et fait les allers et retours depuis son domicile en train. Fatigué, il s’endort dans le TER. Un simple roupillon qui va lui valoir une année de cauchemar.

Tombé dans un sommeil profond, Julien ne se réveille pas à l’arrivée à Oloron-Sainte-Marie, le terminus, où personne ne le secoue pour le tirer des bras de Morphée. Ce n’est que vers 20 heures que l’apprenti épuisé reprend ses esprits.

 

C’est le début des ennuis. Car Julien découvre qu’il est enfermé. Plongé dans le noir et entièrement vide, le wagon a été conduit sur une voie de garage cachée derrière des entrepôts. Le voyageur abandonné garde toutefois son calme et appelle le « 17 » avec son portable. Des gendarmes sont envoyés sur les lieux pour le libérer.

Mais les militaires tardent. Ils butent sur des grilles qui empêchent l’accès à la rame et doivent attendre l’arrivée de l’agent SNCF d’astreinte pour pouvoir s’en approcher. Près de deux heures se sont écoulées lorsque le jeune garçon, claustrophobe et asthmatique, sent la panique monter et une crise poindre alors qu’il ne voit toujours personne à l’horizon. Il finit donc par se saisir d’un marteau brise-vitre et s’attaque à l’une des fenêtres.

Ceux qu’il prend pour ses sauveurs débarquent sur ces entrefaites. Mais ne libèrent qu’un instant le pauvre hère… qui est placé en garde à vue pour « dégradations volontaires » !

La SNCF n’y va pas avec le dos de la cuillère, porte plainte et réclame près de 14 000 euros pour les réparations. Déjà condamné une fois par le passé pour un délit mineur, Julien est renvoyé devant le tribunal correctionnel de Pau par le parquet. La sentence tombe le 20 août 2012 : le jeune Oloronais écope de deux mois de prison avec sursis et doit verser la somme à trois zéros réclamée par la partie civile.

« L’état de nécessité »

« On s’est retrouvés sur le banc des prévenus alors que c’est la SNCF qui a failli à ses responsabilités, en ne vérifiant pas que plus personne ne se trouvait dans le train », dénonce Me Camille Lacaze. La défenseure du voyageur oublié n’en reste pas là et fait appel.

L’affaire arrive devant la cour le 2 avril dernier. L’avocate plaide l’état de nécessité, un motif de relaxe très rarement suivi par la justice qui trouve cette fois-ci un écho positif auprès de l’avocat général. Il requiert en ce sens. La cour lui emboîte le pas dans un arrêt rendu voilà quelques jours, le 30 mai : l’infortuné dormeur est relaxé et la SNCF est déboutée de toutes ses demandes.

« Il incombait au contrôleur du train de vérifier l’état d’occupation des wagons destinés au transport de voyageurs et de réveiller le prévenu, ce qu’il s’est abstenu de faire », notent les magistrats dans leurs attendus. En outre, rappellent-ils, Julien a mis en œuvre tout ce qu’il pouvait pour sortir, sans casse, du train.

« L’infraction poursuivie a été justifiée par l’état de nécessité dans lequel s’est trouvé le prévenu d’éviter une atteinte à sa santé pouvant avoir des conséquences graves dans un lieu confiné », concluent-ils. Une juste remise sur les rails.

Déjà, on peut s’interroger sur l’excès de zèle dont a fait preuve un agent de la SNCF pour qu’une plainte soit déposée contre ce passager, mais surtout je reste ébahie devant le fait qu’il ait été suivi en ce sens par sa direction, par un procureur, par un ou des juristes internes et qu’un avocat ait même soutenu le truc !

Mais, pire que tout, on peut se demander si les vitres des trains sont dorées à l’or fin ! Certes, j’entends qu’il ne faut pas laisser les utilisateurs dégrader les trains, certes j’entends que les vitres de trains puissent couter cher, certes j’entends…blablabla… Mais 14 000€ pour une vitre ? A ce prix-là, j’vais m’faire carglass du train moi !

Et là, on touche le fond, un magistrat professionnel entérine le truc. Pour rappel, en droit pénal français, le principe est l’individualisation de la peine. Cela signifie que pour prononcer la condamnation, le juge est censé prendre en compte tous les paramètres, comme les moyens que ce jeune homme a mis en œuvre pour sortir du train, son état de santé, son salaire etc. 14 000€ pour un stagiaire qui a paniqué en ne voyant toujours pas l’aide arriver alors même qu’il patientait depuis plus de 2h00.

La cour d’appel a bien entendu rendu justice à ce voyageur, mais il lui en aura couté un an de procédure, des frais d’avocat et surement quelques mois d’angoisse face à cette somme astronomique au regard de ses revenus de stagiaire. La véritable question réside encore une fois dans l’obligation de la SNCF d’assurer la sécurité de ses voyageurs, et on se demande dans quelle mesure ce n’est pas cette grande maison qui aurait dû être poursuivie pour n’avoir pas répondu, une fois de plus à cette obligation (de résultat, rappelons-le !).

Il y a quand même des jours où je me demande si ils ne vont pas faire rouler les trains sur le toit tellement ils sont parfois capable de marcher sur la tête !

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